Bienvenue au banquet de la horde primitive!

Publié le par vers une conscience des possibles

    Commençons cette saison par un lieu commun : tout a été dit sur l’affaire DSK, si bien qu’une historiographie devient possible. Désormais, la presse pose sur les événements un regard rétrospectif. Les reproches sur la couverture médiatique apparaissent : on réagit sur le manque de compassion pour la victime. On a encore décrié la scénographie de la justice américaine, et les médias qui l’ont relayé sans prendre en compte les droits de l’accusé. Après des reportages sur la victime dont on ne sait rien, son concierge, la chambre d’hôtel, la femme du présumé coupable, des infographies sur le fonctionnement de la prison, on est donc finalement en droit de penser que tout a été effectivement dit.

 

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J’aimerai, pourtant, rajouter ma touche de commentaires, que je ne développerai pas trop, pour m’en tenir à un format ‘20min’. La couverture médiatique de cette histoire qui relève du fait divers, est, de toute évidence, inhabituelle. Il faut déconstruire un mythe, qui a été construit par ceux-là même qui le déconstruisent. D’un jour à l’autre, les photos changent, les commentaires aussi. Des journalistes sont mandatés pour rédiger une biographie qui a tous les traits d’une nécrologie. On tire le bilan du futur ex-président du FMI. On parle de ses penchants. Puis finalement, on insiste dans un article sur sa femme, à rappeler son rapport à la « judéité. »


Mais, les théories du complot sont populaires. L’homme DSK est encore apprécié. Et l’on ne parviendra pas à faire de lui, le monstre habituellement ébauché par les médias pour toute affaire de viol. Il faut alors dédramatiser. Or, il me semble que l'accentuation opérée par les médias autour des faits reprochés à DSK fait parti de cette tentative de dédramatisation. Décrire un viol, ou une tentative, c’est le déconstruire. On observe cette même absence de pudeur dans l’affaire qui l’oppose à l’écrivaine Tristiane Banon. Ce qui discrédite la thèse d'un voyeurisme  spécifique au contexte américain. L’accusé doit faire témoignage. « Si tu as vraiment été violé par lui, dit nous ce qu’il t’a fait. » Veut-on être inconsciemment violé ? Les psychanalystes répondront mieux que moi. Mais, la couverture traditionnellement accordée pour toutes affaires de viols montre bien que ces crimes relèvent de l’intime, et ne peuvent pas être partagés. En rompant le tabou, quelque part, le viol est nié. 


Finalement, si DSK a toujours été « borderline », comme tout le monde le savait, on peut se demander pourquoi n’a-t-il pas été arrêté plus tôt ? La faute à la culture française du secret ont tranché les journaux. Je concéderais plus volontiers que l’impunité dont a pu bénéficier DSK n’a été possible que parce qu’elle s’accordait avec les intérêts de tous. L’intérêt général construit sur la somme des intérêts particuliers nous a ainsi poussé à taire des attitudes moralement condamnables. Notre cécité pour le bénéfice de tous! Les réactions d’hostilités contre la victime, (cf BHL, ou le fait que 70% des français pensent que l’on est confronté à un complot) ne sont que la traduction d’une révolte de l’intérêt général contre l’intérêt particulier d’une jeune femme, qui n’a pas voulu contextualiser. Sa moralité, qu’elle a placé au-dessus de n’importe quel bénéfice, dynamite un compromis social édifié depuis plusieurs mois par la société française. Suite à sa plainte, nos intérêts particuliers ne deviennent plus que dérisoires. Désormais, il faut nous élever, pour placer notre morale au niveau de celle de cette jeune femme.


Et cette semaine, ce mois peut-être, sous les coups d’une mastication qui ne pourra taire les douleurs d’une digestion qui frôle le cannibalisme, il faudra répondre à l’appel du tocsin : le dernier des éléphants est mort... et nous ne l'avons même pas sacrifié!

 

A l’avenir, j’essaierai de finir par un petit lien: Les silences de Dominique 

Publié dans Faits divers

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